Ce disque mérite que l’on s’arrête pour lui adresser quelques commentaires car il apporte dans le registre qu’est le sien un certain nombre d’éléments nouveaux pouvant inviter le milieu qui pratiquent cette musique à s’engager dans cette voie.
Tout d’abord, il ouvre le répertoire, au-delà des tubes fixés par Martin Cayla et des classiques du néo folklore Aubracien à des créations qui n’ont rien à envier aux archétypes jusque-là sacralisé. De plus, il inhume quelques pièces d’un grand intérêt esthétique comme la valse d’Antoine Bouscatel et la bourrée à Régis.
Ainsi l’on peut apprécier les univers musicaux de tous ces interprètes qui du fait de leur pratique et de leur imaginaire, nous révèle de vrais talents de compositeur. Des compositeurs qui nous laissent entendre la manière dont ils pensent la mélodie et le rythme, et ici, Michel Esbelin et Claude Quintard sont bel et bien dans cette lignée.
Je tiens à préciser que ce disque donne à entendre un joueur d’accordéon chromatique de haut vol où son jeu s’inscrit dans la liste des grands de cet instrument car tout est là : le style, la rythmique et surtout une puissance d’expression qui fait que sa musique parle patois.
Quant au cabrettaïre, sa précision, son phrasé et le son qui le caractérise ne sont pas à démontrer, il est connu de mes oreilles et c’est toujours un plaisir que d’entendre cette qualité de maîtrise.
Si j’avais quelques réserves, je dirais :
- Que le mixage n’est pas toujours au service de ce couple instrumental où l’accordéon est parfois desservit. Un plus juste équilibre eut été plus judicieux.
- Que la virtuosité de Michel Esbelin aurait pu profiter de quelques échappées pour nous couper le souffle même si le choix d’un jeu plus coulé, plus « Costerosien » me convient pleinement et invite les obsédés du picotage à élargir leur palette. Il me semble que le jeu de la maturité, car c’est bien de cela qu’il s’agit, peut également supporter quelques envolées lyriques.
- Que quelques choix de répertoire aurait pu, comme les polkas piquées, nous faire entendre des versions plus rares, mais le fait de lier des grands classiques avec du répertoire inventé a au moins l’avantage d’indiquer le chemin à suivre tout en donnant à comprendre la démarche de leur duo.
Ma dernière remarque concerne les documents iconographiques où se sont glissées quelques lacunes dans les sources alors que les photos illustrant le livret renferment quelques perles. La photo de la page 16 est de Charlie Beyer – collection AMTA et celle de la page 17 est d’André Ricros – collection personnelle de l’auteur.
Désormais, il ne nous reste qu’à attendre la suite en espérant que s’ouvre un nouvel espace musical pour ce couple improbable qu’est celui de la cabrette et de l’accordéon.
Je profite de cet article pour transmettre quelques éléments à Claude Quintard sur une partie de sa famille qui peut-être a échappé à sa filiation : la famille Blancon
La famille Blancon mérite ici d’être saluée car elle nous a donné de nombreux musiciens. Sur les neuf enfants, au moins trois furent cabrettaïres :
- Joseph Adrien, né le 26 octobre 1901 – en haut à droite
- Pierre, né le 27 février 1905 -en bas assis à droite
- Célestin Julien, né le 19 octobre 1911 – au centre en bas
et un joueur d’accordéon
- Albert Georges, né le 29 janvier 1919 – dans les bras de son père.
- Berthe, Mère de l’accordéoniste Claude Quintard, assise 2ème à gauche
Pour compléter ces informations quelques photographies de ces musiciens :
Tout d’abord une photographie des trois plus connus ou leur image fut fixée à de nombreuses reprises devant le château d’Alleuze.
Par contre, chose plus rare, sont les images représentant le troisième joueurs de cabrette – Julien Blancon – qui réussit à s’extraire de la condition de ses parents en devenant instituteur.
Photo prise à Paris qui, même si elle est mal cadrée, nous montre Julien Blancon à gauche avec son frère Adrien au milieu et peut-être un autre de ses frères, soit Vital, soit Louis qui, si c’est bien l’un deux, porterait le nombre de joueurs de cabrette de cette famille à quatre.
Jusqu’à ce jour et à ma connaissance, seul Pierre Blancon nous a laissé des enregistrements où l’on peut découvrir la qualité de son jeu. Je ne sais si Adrien ou Albert ont laissés des traces sonores, par contre Julien n’a pas laissé le moindre morceau sur une bande ou sur une cassette.
Ces quelques documents et ceux qui les accompagnent restent à la disposition des descendants de cette famille qui de toute évidence a su transmettre sa passion pour la musique.
André RICROS
merci andré pour cette découverte!!