Cette belle chanson est interprétée par Lucien Collonge, qui était cultivateur à La Croix de Muratte, commune de Palladuc dans le Puy-de-Dôme. Il a été enregistré par Jean Dumas le 19 février 1960.
Le thème de cette chanson est répandu dans la tradition francophone, mais les exemples sur le territoire auvergnat sont assez rares, ce qui rend cette version d’autant plus précieuse. Le texte de la chanson est particulièrement poétique et mystérieux :
La particularité de cette chanson réside dans le fait que le premier couplet ne présente pas la même mélodie que les suivants, il s’agit vraisemblablement d’un accroche permettant de « lancer » la chanson. C’est en quelque sorte une introduction alors qu’on a déjà commencé :
On voit que la division du temps est ambigüe, étant à la fois binaire (temps divisé en deux) et ternaire (temps divisé en trois). Mais cette ambiguïté déborde sur les notes : les dièses et les bémols entre parenthèses indiquent la tendance de la note, mais en réalité on est toujours entre deux. Le tempérament non égal de cette mélodie en renforce la beauté et le mystère. Sur les couplets suivants, la mélodie se stabilise, tout en conservant les mêmes particularités :
Les notes tenues ou allongées sont toujours chantées avec une voix ample et vibrée, ce qui crée de l’espace, comme une profondeur de chant nous permettant d’imaginer plus facilement cette histoire étrange qui nous est racontée : il s’agit d’une simple poursuite amoureuse, mais faisant intervenir tous les éléments (le vent, la terre, etc…), s’inscrivant alors dans une véritable cosmogonie.
Pour finir, voilà ce qu’avait noté Jean Dumas à l’époque de l’enregistrement pour tenter de fixer cette chanson au phrasé et à la mélodie si mobiles. Par un système d’agencement de couleurs, il avait tenté d’en noter les variations :
Eric Desgrugillers