La tête penchée sur ses pas, faisant jusqu’à disparaître son ombre, elle avançait du côté droit de la route qui monte en revenant du marché. Son panier se balançait à l’envers des mouvements de son corps et, dans les noirs habits qui semblaient l’ensevelir, elle chantait doucement pour elle et pour ceux qu’elle imaginait tout près dans la tiédeur de son intimité.
Sa tête s’emplissait de ces vibrations qui restaient prisonnières de son crâne et venaient ruisseler en vagues régulières sur les pavés de son histoire pour arroser sans cesse ses pensées. Le paysage était ainsi repeint à l’infini. C’est sous des apparences d’aquarelles que le monde se fixait pour que tout en haut de la côte, la tête se redresse et que s’ouvrent les yeux.
La chanson s’estompa jusqu’à disparaître. Roulant du côté droit de la route, elle s’allongea pour attendre le prochain passant qui ne pourrait pas franchir la côte en revenant du marché.
– Saurons-nous un jour ce qu’il transportait ?
– Non, nous ne saurons sans doute jamais ce qu’il y avait dans le panier.
Texte inspiré par Léon Peyrat, Saint-Salvadour (19)