C’est une bourrée très connue, chanté par Pierre Lamarche de Trébiac, enregistré le 31 janvier 1989 par José Dubreuil.
ENQ0005_01 las tres aulanas B3
Cette bourrée est interprétée avec beaucoup de précision dans le phrasé. Le chanteur alterne de façon très sûre les accents et les suspensions, ce qui donne à la fois de la souplesse et de la dynamique. Regardons sur la partition cette alternance d’un peu plus près.
Les suspensions, notées par un tiret sur la note, se situent toujours à contre-temps, jamais sur un temps fort (c’est-à-dire sur la première note de la mesure). Cela veut dire que le contre-temps est étiré, et donc mis en exergue et agissant alors sur le rythme en accentuant le balancement (on pourrait dire le « swing »). Les accents, que nous appelons également « appuis » constituent un tremplin sur lequel l’interprète lance sa mélodie et sont principalement situé sur les temps forts, sauf quelques uns (mesures 5, 9, 12). Ils sont anticipés et se retrouvent le troisième temps de la mesure précédente. Ces appuis-là sont très surprenants et opèrent une relance inattendue mais très efficace. Les pas des danseurs sont donc soutenus par une rythmique vivante, dynamique et suspendue. Là est tout l’art du chanteur à danser.
Le passage au tralala souligne également la sobriété et l’efficacité de ce chanteur en matière de souplesse et de dynamique. Le passage sous la liaison assure une très longue suspension qui aboutit, à la mesure 21 à une découpe rythmique très marquée et très serrée, du fait de la suite de doubles croches. Un extrême appelle son contraire, et le chant voyage entre l’effet planant des suspensions et les accélérations provoquées par les découpes et les appuis. La bourrée n’est pas prête de s’endormir! il ne faut jamais qu’elle ferme l’oeil!
Eric Desgrugillers
pour aller plus loin :
Bonjour,
Surpris de votre surprise. Les bourrées comportant ce type d’accentuation (croche-noire dans une mesure 3/8) n’est pas si rare. Voir Mo Mairé, Ieu n’ai cin sos, Lo Glaudo, Lou diziou bè, dans le recueil de « La Bourrée ». Il en existe sans doute bien d’autres.
Cordialement,
Claude
Bonjour, il ne s’agit pas des accents dont vous parlez qui sont effectivement courants. Je mettais juste le doigt sur l’anticipation d’un temps fort : au lieu d’accentuer le premier temps de la mesure 6 (je ne compte pas la levée comme une mesure), on accentue le troisième temps de la mesure 5. Ce qui donne 2 accents dans la mesure 5 et aucun dans la mesure 6 : l’accent s’est « balancé » d’une mesure à l’autre. Ce procédé (qui me paraît essentiel) est relativement rare dans la bourrée chantée.
J’espère avoir expliqué plus clairement ce que j’avais entendu, merci en tout cas pour votre remarque qui met en lumière le manque de clarté de la mienne,
bien cordialement,
Eric Desgrugillers