« J’aimerais pouvoir dire que c’est dans cette vallée au pied des monts du Cantal que je suis né. Cela m’aurait donné un petit côté enfant du pays dès le début de mon récit, mais ce serait faux, car comme bon nombre d’auvergnats, je suis né à Paris.
J’ai donc vu le jour dans le quartier de la Goutte d’Or, non loin du Sacré Cœur. A l’époque les auvergnats représentaient un pourcentage important dans la démographie du quartier et il n’était pas rare d’y entendre les échos joyeux de la langue de chez nous se mêler aux accents gouailleurs des titis parisiens.
Dans ce coin de Paris mes parents tout jeunes mariés débarquèrent un beau matin avec quelques bagages et l’espoir d’y trouver un mode de vie qu’ils ne pouvaient espérer dans le village qu’ils venaient de quitter. Mon père exerça alors le métier de frotteur, en même temps que celui de cabrettaïre, et ma mère accouchant un an plus tard d’un gros et beau garçon (c’était moi !) devint tout naturellement « mère au foyer ».
Je ne garde qu’un vague souvenir du temps passé dans ce quartier. J’ai dû y grandir un an, peut-être deux… pendant lesquels s’est déroulée une existence paisible et sans histoire.
Durant ces quelques années mon père commençait à se faire une réputation de cabrettaïre qui le plaçait déjà parmi les meilleurs. Mais dans mon insouciance d’enfant, je ne pouvais me rendre compte de l’importance que ce détail prendrait plus tard dans ma vie. Il fallut donc que s’écoule encore un certain temps avant que je ne ressente un attrait soudain pour la cabrette.
Quelles furent les raisons de ce brusque intérêt pour l’instrument dont mon père jouait ? Je crois bien que jamais je n’aurais su le dire si un jour, alors que nous évoquions des souvenirs, ma mère ne m’avait dit :
– « T’en sovènes, lo jorn qu’avias pris una cabreta del vielh per t’en servir de cana? »
(Tu t’en souviens le jour où tu avais pris une cabrette du « vieux » pour t’en servir de canne?)
Il y a parfois des souvenirs que l’on pourrait croire à jamais effacés et qu’un simple déclic ramène au premier plan. Ma mère avait prononcé une phrase, et voilà que soudain ressurgissait dans ma mémoire toute cette scène de mon enfance. »…
Ainsi débute l’autobiographie de Pierre Ladonne, troisième du nom, né en 1931, qui déroule la vie artistique d’une lignée de quatre joueurs de cabrette , issus du canton de Pierrefort dans le Cantal et de la colonie auvergnate de Paris. Il nous fait partager leur quotidien et leur parcours initiatique nourris de mélodies des plus grands joueurs de cornemuse de l’époque (Antoine Bouscatel, Victor Allard, …).
L’élève devenu maître grave aujourd’hui sur papier une aventure à découvrir qui, jusque là, ne fût transmise que de mémoires en mémoires. C’est là une des originalités de cette publication car il existe peu d’exemples à l’échelle nationale où les acteurs eux-mêmes laissent des traces écrites de leur trajectoire. En 200 pages, nous nous retrouvons au cœur des souvenirs de la famille de Pierre Ladonne mais aussi dans l’histoire des Auvergnats de Paris et d’ici.
Ce livre publié par l’Agence des Musiques des Territoires d’Auvergne (AMTA) est accompagné d’un C.D 24 titres ainsi que d’une vingtaine de partitions de morceaux préférés de musiciens cités dans le récit.
Dimanche 4 juillet à St Martin Sous Vigouroux(15) dans la maison familiale devenue depuis maison communale se sont réunis de nombreux élus des régions Auvergne et Midi-Pyrénées et de nombreux musiciens d’ici, d’ailleurs et de Paris pour fêter la parution de cet ouvrage.
De la sortie de la messe au repas du soir, les musiques et danses traditionnelles ont été le coeur de la fête patronale. Il faut dire que les nombreux musiciens présents se sont relayés sans cesse pour le plus grand plaisir des danseurs. C’est ainsi que nous avons pu entendre, entre autre, Didier Pauvert, Jean-Pierre Delbert, Guy Mège, Cédric Bachellerie, Max Brunie, Pierre Raynal, Jean-Pierre Moulara, Jean-Claude Rieu, Joseph Ruols, René Vernier, Martine Journeau, Christophe Burg, Réné Pinquier, André Ricros …
Del Cap de la Roca Negra…au fil des souvenirs (C.D + livre) est disponible chez de nombreux commerçants et auprès d’Auvergne Diffusion : www.Auvergnediffusion.fr au prix de 25€ + frais de port.